Patrimoine et séisme à Rhodes
Avec la promo 2015-2017 du DSA Risques Majeurs et la promo 2014-2016 du DSA Architecture & Patrimoine de l’ENSA Paris Belleville
Il y a du nouveau à l’ENSA Paris Belleville !
En 2016, les DSA Risques Majeurs et Architecture & Patrimoine ont été mis en place un double projet à long terme. Tout d’abord, la création d’un workshop commun afin de mélanger les problématiques des deux DSA. Ensuite, ouvrir un partenariat avec une université européenne incluant à terme la participation d’élèves du pays d’accueil, permettant un échange culturel et de connaissances sur les risques endémiques et le patrimoine local.
Le site retenu pour ce projet se situait l’île de Rhodes dans le Dodécanèse grec. Île australe, elle se situe à 17 kilomètres à peine des côtes turques. Quatrième île de l’archipel grec par sa taille, elle a de tous temps été soumise à des risques majeurs. Son histoire témoigne des aléas qui la touchent. Fondée en 408 avant JC, la ville de Rhodes a subit les attaques répétées de ses voisins. Le colosse de Rhodes, édifié en 304 pour célébrer la défense victorieuse contre des envahisseurs, fut détruit quelques années plus tard par un tremblement de terre. Conquise par les romains, l’île fit partie de l’empire byzantin jusqu’en 1306 où elle fût cédée aux chevaliers de l’Ordre de Saint Jean, ordre de croisés chassé du proche orient lors de la chute de Saint Jean d’Acre en 1291. La ville s’est transformée en forteresse médiévale, développant les fortifications datant de l’époque byzantine. Assiégée tour à tour par les Egyptiens et les Ottomans, la forteresse subit aussi le dévastateur tremblement de terre de 1481. En 1522, les Ottomans en prennent définitivement possession. S’en suit une longue période de paix jusqu’à l’arrivée des Italiens en 1912. C’est sous le fascisme que se développe la notion de préservation du patrimoine. Une notion très subjective car ces derniers mettent en valeur l’héritage gréco-romain, au détriment de l’architecture Ottomane. Point stratégique durant la deuxième guerre mondiale, l’île est bombardée en 1943 et finalement cédée aux Anglais après une courte domination nazie. La rétrocession à la Grèce eut lieu en 1947.
Depuis, l’île vit paisiblement du tourisme, si l’on excepte l’activité sismique avec une période de retour de 40 ans. Les derniers tremblements de terre importants eurent lieu en 1928, 1967 et 2008.
Réalisé durant l’hiver 2015-2016, le workshop s’est déroulé en trois étapes. Une phase préparatoire d’échange entre les DSA a été utile afin de se familiariser aux problématiques propres à chaque spécialisation. Puis le voyage à Rhodes proprement dit au début janvier 2016. Durant une semaine, nous avons réalisé une analyse détaillée d’un site architectural. Quatre groupes ont été formés en mélangeant les étudiants des deux formations. Quatre sites furent retenus : une ancienne église byzantine, une porte de la muraille d’époque médiévale et deux maisons, une catalane (médiévale) et une ottomane. Le travail consistait en une analyse et un diagnostic patrimonial et structurel approfondi afin de proposer des solutions viables de conservation et de réhabilitation intégrant la notion de gestion des risques majeurs. La méthodologie prévoyait d’étudier avec un maximum de précision les constructions par le biais de relevés géométriques, d’études des structures et de matérialité ainsi que de l’état de détérioration des ouvrages.
Ce travail a été encadré par le professeur Yannis Kizis de l’Université Nationale Technique d’Athènes, et président du Comité de Sauvegarde de la ville médiévale de Rhodes ainsi que par le docteur Katerina Manousou et Giorgios Dellas du bureau technique de restauration des monuments de Rhodes. Ces derniers, ainsi que les ingénieurs-structure Alkimos Papathanasiou et Eleftheria Takanika ont proposé des conférences sur la restauration du patrimoine de l’île et les défis structurels d’une telle activité durant la semaine.
Sur place, des relevés pierre par pierre ont été réalisés sur la Porte Sainte-Catherine, d’assemblage sur la Maison Ottomane et la Maison Catalane et de précision archéologique sur l’Eglise Byzantine.
Après avoir déterminé la vulnérabilité du bâti face au séisme, et parfois aux inondations, grâce aux diagnostics patrimoniaux et structurels, des zones de refuge ont été définies.
Suite aux diagnostics révélant des zones d’habitat en état d’insalubrité et de vulnérabilité structurelle importante, des propositions de confortement parasismique et de révélation de l’historique patrimonial des lieux ont été développées.
De retour à Paris, le travail d’analyse et de diagnostic servit à la réalisation des projets de réhabilitation, de conservation et de mesures de consolidations d’urgence et à long terme des édifices étudiés. Les groupes formés furent conservés afin de pouvoir confronter les intérêts propres à chaque formation.
Un point n’aura toutefois pas pu être abordé : la question des migrants. Rhodes est un des points d’entrée de l’Union Européenne, le plus proche des zones de conflits actuels. Nous savons en effet qu’il y existe un camp de transit dans la zone portuaire.
Ainsi, l’île de Rhodes est un sujet d’étude recouvrant une grande partie des problématiques des deux DSA.
Nous vous invitons à consulter les documents graphiques ci-dessous pour découvrir l’angle d’étude qu’ont développé les architectes et à suivre l’évolution des projets avec les prochaines promotions.
H. Morell y Alcover